Fiscal,Patrimoine
Plus-values des particuliers
Apport réalisé avant 2017 : la soulte portée en compte courant bloqué pendant 5 ans non abusive
Dans le cadre d’un apport réalisé avant 2017, la soulte inférieure à 10 % de la valeur nominale des titres reçus peut bénéficier du report d’imposition obligatoire dès lors que le montant inscrit au compte courant de l’apporteur a fait l’objet d’une convention de blocage pendant 5 ans en garantie de financements bancaires éventuels.
Pour les apports de titres à une société soumise à l'IS réalisés avant 2017, le report d'imposition s'applique à la plus-value d'apport, y compris en ce qui concerne le montant de la soulte reçue qui n'excède pas 10 % de la valeur nominale des titres reçus (CGI art. 150-0 B ter dans sa rédaction antérieure à la loi 2016-1918 du 29 décembre 2016).
Toutefois, un apport avec soulte respectant le seuil de 10 % peut être remis en cause sur le terrain de l'abus de droit fiscal s'il apparaît que la soulte avait pour seule justification de permettre à l'apporteur d'appréhender immédiatement, en franchise d'impôt, des liquidités (LPF, art. L. 64).
Dans cette affaire, l’administration fiscale a considéré que la soulte reçue par l’associé unique d’une holding, d’une valeur nominale de 142 780 €, en contrepartie de l’apport d’actions de SAS, bien qu’étant inférieure à 10 % de la valeur des parts reçues en contrepartie de son apport, était abusive et devait être imposée l’année de l’apport, assortie de la majoration de 80 % pour abus de droit.
En appel, l’administration fiscale a été déboutée. La Cour administrative d’appel ayant considéré que l’inscription de la soulte en litige au crédit du compte courant de la société bénéficiaire de l’apport ne suffisait pas, par elle-même, en présence d’une convention prévoyant le blocage de cette somme pendant 5 ans, à la faire regarder comme ayant été effectivement appréhendée par l’intéressé.
Le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique se pourvoit alors en cassation. Son pourvoi est rejeté.
Pour le Conseil d’État, la stipulation de la soulte poursuivait au moins en partie un objectif autre que fiscal, dans la mesure où compte-tenu de l’engagement contractuel de blocage du compte courant d'associé à concurrence du montant de la soulte pendant une durée de 5 ans, la soulte n’avait été effectivement remboursée ni immédiatement, ni dans les 3 ans de l’apport. Par ailleurs, ce blocage visait à ce que la somme correspondante puisse être proposée en garantie aux banques et à ce que les financements nécessaires au développement du groupe puissent être demandés avec de meilleures chances de succès. Ce nantissement avait été effectivement proposé, même s'il n'y avait pas été in fine recouru, à un établissement bancaire à l'occasion d'une opération de développement du groupe animé par la holding.
À noter : pour les apports réalisés depuis le 1er janvier 2017, la plus-value d’apport ou d’échange est imposée immédiatement à hauteur de la soulte (CGI 150-0 B ter, I.al. 2). Ainsi, le différé d’imposition ne s’applique qu’à la différence entre le montant de la plus-value d’apport ou d’échange et la soulte.
Pour aller plus loin :
« Titres de sociétés et instruments financiers : quelle fiscalité ? », RF 2021-5, § 7318
CE 29 septembre 2029, n° 471003